Commission européenne : Ursula von der Leyen propose un nouveau portefeuille dédié à la Méditerranée
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a annoncé jeudi (18 juillet) qu’elle créerait un portefeuille séparé dédié à la Méditerranée si elle restait à la tête de l’exécutif, laissant penser qu’elle accorderait plus d’attention à la région lors d’un éventuel second mandat.
« La région méditerranéenne devrait retenir toute notre attention », a déclaré Mme von der Leyen aux législateurs européens ce jeudi matin à Strasbourg.
« C’est pourquoi je désignerai un commissaire pour la région et proposerai, avec [la future Haute représentante de l’UE pour la Politique étrangère et de Sécurité] Kaja Kallas, un nouveau programme pour la Méditerranée. Parce que les deux rives méditerranéennes ont un seul et même avenir », a-t-elle poursuivi.
Dans ses orientations pour la législature 2024-2029, Mme von der Leyen propose que le nouveau portefeuille se concentrera sur « l’investissement et les partenariats, la stabilité économique, la création d’emplois, l’énergie, la sécurité, la migration et d’autres
domaines d’intérêt mutuel, dans le respect de nos valeurs et principes ».
Le Moyen-Orient au cœur des préoccupations
Dans son discours devant les eurodéputés, Mme von der Leyen a en outre promis d’accorder une plus grande attention à la guerre qui se déroule à Gaza et à la situation plus générale au Moyen-Orient.
« Trop d’enfants, de femmes et de civils ont perdu la vie en conséquence de la réponse d’Israël à la terreur brutale du Hamas », a déploré Mme von der Leyen, appelant à un « cessez-le-feu immédiat et durable » et à la libération de tous les otages.
Elle s’est engagée à augmenter l’aide humanitaire, qui s’élève actuellement à environ 200 millions d’euros, et à mettre en place « un train de mesures de soutien pluriannuel beaucoup plus vaste en faveur d’une Autorité palestinienne effective ».
« La solution à deux États est le meilleur moyen de garantir à la fois la sécurité des Israéliens et celle des Palestiniens », a ajouté l’Allemande.
Cette décision a été perçue comme une concession faite à des pays tels que l’Espagne et l’Irlande, grands défenseurs de la Palestine, ainsi qu’au groupe des Socialistes et Démocrates (S&D), qui n’avaient pas hésité à critiquer Ursula von der Leyen pour ses messages contradictoires avec une position commune de l’UE après le 7 octobre.
Dans ses orientations politiques, elle a également annoncé que sa Commission élaborerait une stratégie globale plus large pour l’UE et le Moyen-Orient en prévision de l’après-guerre à Gaza.
L’Espagne, l’Irlande et la Norvège vont reconnaître l’État palestinien, tandis qu’Israël rappelle ses ambassadeurs
L’Espagne, l’Irlande et la Norvège ont annoncé une initiative visant à reconnaître un État palestinien mercredi (22 mai), une décision qui divise l’UE et qui a mené le gouvernement israélien à rappeler certains de ses ambassadeurs pour des « consultations ».
Séparer élargissement et voisinage ?
Lors de son discours, Ursula von der Leyen a réaffirmé que la prochaine Commission européenne donnerait la priorité à l’élargissement, les pays des Balkans occidentaux, l’Ukraine, la Moldavie et la Géorgie ayant « fait leur libre choix » et leur avenir étant au sein de l’Union.
« Accueillir des pays dans notre Union est une responsabilité morale, historique et politique. Il s’agit d’une responsabilité géostratégique immense pour l’Europe », a déclaré la présidente sortante.
« Nous soutiendrons les candidats en travaillant sur les investissements et les réformes et en les intégrant là où nous le pourrons dans nos cadres juridiques […] Et nous veillerons à ce que tous les pays soient prêts, avant leur adhésion à l’Union », a-t-elle noté. Des objectifs qui seront atteints en nommant un commissaire dédié à l’élargissement.
Le portefeuille de l’élargissement comprend actuellement le renforcement des relations avec les voisins de l’UE, la mise en place d’une perspective d’adhésion crédible et le soutien des réformes dans les neuf pays candidats à l’adhésion à l’UE.
Comme précédemment rapporté par Euractiv, des rumeurs sur une division du portefeuille avaient déjà circulé. Cette division serait opérée entre un mandat pour les pays candidats à l’adhésion à l’UE susceptibles d’adhérer à l’avenir, et ceux plutôt considérés comme « proches voisins », tels que les pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.
Une majorité de diplomates de l’UE semble favorable à une telle séparation, étant donné que les attributions actuelles liées au poste ont souvent conduit le commissaire en question à alterner entre la gestion des négociations d’adhésion à l’UE et les accords de migration avec les pays du voisinage sud.
La création d’un portefeuille distinct pour la Méditerranée devrait permettre d’accorder plus d’attention à cette région longtemps négligée.
Les relations avec l’Union pour la Méditerranée, un forum réunissant des représentants de l’UE et des États du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, pourraient s’en trouver améliorées.
Depuis novembre dernier, le forum a connu un regain d’intérêt en tant que plateforme qui pourrait permettre de relancer les pourparlers israélo-palestiniens une fois la guerre terminée, car les deux parties y seraient placées sur un pied d’égalité.
Toutefois, certains fonctionnaires de l’UE ont déjà fait remarquer que cette scission des tâches pourrait créer davantage de tensions entre ce nouveau rôle et le poste de Haute diplomate de l’UE, qui devrait être occupé par l’Estonienne Kaja Kallas.
L’un des inconvénients possibles est que Mme Kallas devra veiller à ce qu’à l’avenir, deux commissaires, au lieu d’un actuellement, suivent la même ligne politique qu’elle et que le Service européen sur l’Action extérieure (SEAE).
Bien que la Haute représentante de l’UE devrait s’occuper des relations étrangères et des questions de sécurité et les commissaires des programmes bilatéraux et des questions de financement, il y a eu ces cinq dernières années de nombreuses tensions avec la Commission européenne en raison des excès de zèle de celle-ci sur certains sujets, tels que Gaza et les Balkans occidentaux.
En outre, on ne sait pas comment l’aspect « migration » du nouveau portefeuille de commissaire chargé de la Méditerranée pourrait coexister avec le poste du commissaire responsable de la migration. En effet, le nouveau portefeuille traiterait probablement des nouveaux accords migratoires conclus avec plusieurs pays d’Afrique du Nord.