Conclusions du Conseil européen, 23 et 24 juin 2022
Principaux résultats
I. L’EUROPE AU SENS LARGE
1. Le Conseil européen a tenu un débat stratégique sur les relations de l’Union européenne avec ses partenaires en Europe. Il s’est penché sur la proposition de lancer une communauté politique européenne.
Quoi, qui et comment ?
Le but est d’offrir une plateforme de coordination politique pour les pays européens à travers le continent. Cette plateforme pourrait concerner tous les pays européens avec lesquels nous entretenons des relations étroites.
L’objectif serait de favoriser le dialogue politique et la coopération afin de répondre aux questions d’intérêt commun, de manière à renforcer la sécurité, la stabilité et la prospérité du continent européen.
2. Ce cadre ne remplacera pas les politiques et instruments existants de l’UE, notamment l’élargissement, et il respectera pleinement l’autonomie décisionnelle de l’Union européenne.
3. Sur la base de ce premier échange de vues, le Conseil européen reviendra sur cette question.
II. UKRAINE
4. Le Conseil européen a discuté de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine dans les différentes dimensions qu’elle revêt. Le Conseil européen réaffirme qu’il se tient résolument aux côtés de l’Ukraine et que l’Union européenne continuera d’apporter à l’Ukraine un soutien appuyé à sa résilience économique, militaire, sociale et financière globale, y compris de l’aide humanitaire.
5. Le Conseil européen condamne fermement les attaques sans discrimination perpétrées par la Russie contre des civils et des infrastructures civiles, et il demande instamment à la Russie de retirer immédiatement et sans condition toutes ses troupes et tous ses équipements militaires de la totalité du territoire de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières reconnues au niveau international. Le droit international humanitaire, y compris en ce qui concerne le traitement des prisonniers de guerre, doit être respecté. Il faut permettre immédiatement le retour en toute sécurité des Ukrainiens, notamment des enfants, déplacés de force en Russie. La Russie, la Biélorussie ainsi que tous les responsables de crimes de guerre et d’autres crimes parmi les plus graves auront à répondre de leurs actes, conformément au droit international.
L’adoption du sixième train de sanctions de l’UE renforce encore la pression sur la Russie pour qu’elle mette fin à sa guerre contre l’Ukraine. Les travaux sur les sanctions vont se poursuivre, notamment pour renforcer leur mise en œuvre et empêcher qu’elles soient contournées. Le Conseil européen appelle tous les pays à s’aligner sur les sanctions de l’UE, en particulier les pays candidats. Il convient de parachever rapidement les travaux sur la décision du Conseil relative à l’ajout de la violation des mesures restrictives de l’Union à la liste des domaines de criminalité établie par l’UE.
6. L’Union européenne reste fermement déterminée à fournir davantage de soutien militaire afin d’aider l’Ukraine à exercer son droit naturel de légitime défense contre l’agression russe et à défendre son intégrité territoriale et sa souveraineté. À cette fin, le Conseil européen demande au Conseil de travailler rapidement à une augmentation supplémentaire de l’aide militaire.
7. Le Conseil européen prend note de la présentation prochaine par la Commission d’une proposition visant à accorder à l’Ukraine une nouvelle assistance macrofinancière exceptionnelle à hauteur de 9 milliards d’euros en 2022. Il invite la Commission à présenter rapidement ses propositions relatives à l’aide de l’UE pour la reconstruction de l’Ukraine, en consultation avec des partenaires, organisations et experts internationaux.
8. La Russie, en faisant de l’alimentation une arme dans sa guerre contre l’Ukraine, est la seule responsable de la crise mondiale de la sécurité alimentaire qu’elle a provoquée. Le Conseil européen appelle instamment la Russie à cesser immédiatement de cibler les installations agricoles et d’emporter les céréales, ainsi qu’à débloquer la mer Noire, en particulier le port d’Odessa, de manière à permettre les exportations de céréales et les opérations de transport maritime commercial. Le Conseil européen soutient les efforts déployés à cette fin par le secrétaire général des Nations unies. Le Conseil européen souligne que les sanctions de l’UE contre la Russie permettent la libre circulation des produits agricoles et alimentaires ainsi que l’acheminement de l’aide humanitaire.
9. Le Conseil européen soutient résolument les efforts sur les corridors de solidarité en vue de faciliter les exportations de denrées alimentaires en provenance d’Ukraine via différentes voies terrestres et différents ports de l’UE. Il invite la Commission et les États membres, en s’appuyant en particulier sur l’initiative FARM ainsi que sur les initiatives des Nations unies et du G7, à intensifier leurs efforts pour:
1) aider les pays en développement à réorienter, au besoin, leurs chaînes d’approvisionnement;
2) accélérer la mise en œuvre des initiatives phares Équipe Europe pertinentes convenues lors du récent sommet Union européenne ‑ Union africaine, qui visent à développer une production alimentaire durable et à renforcer la productivité agricole, notamment en ce qui concerne les protéagineux, et les capacités de l’agro-industrie sur le continent africain; et
3) travailler à des initiatives avec les partenaires internationaux en vue de soutenir, dans les pays en développement, le déploiement de capacités de production d’intrants, en particulier d’engrais durables.
III. DEMANDES D’ADHÉSION DE L’UKRAINE, DE LA RÉPUBLIQUE DE MOLDAVIE ET DE LA GÉORGIE
10. Le Conseil européen reconnaît la perspective européenne de l’Ukraine, de la République de Moldavie et de la Géorgie. L’avenir de ces pays et de leurs citoyens réside au sein de l’Union européenne.
11. Le Conseil européen a décidé d’accorder le statut de pays candidat à l’Ukraine et à la République de Moldavie.
12. La Commission est invitée à rendre compte au Conseil du respect des conditions énoncées dans les avis de la Commission sur les différentes demandes d’adhésion, dans le cadre de son paquet “élargissement” régulier. Le Conseil décidera des mesures ultérieures une fois que toutes ces conditions seront pleinement remplies.
13. Le Conseil européen est prêt à accorder le statut de pays candidat à la Géorgie une fois que les priorités énoncées dans l’avis de la Commission sur la demande d’adhésion de la Géorgie auront été prises en compte.
14. La progression de chaque pays sur la voie de l’Union européenne dépendra de ses mérites propres pour ce qui est de se conformer aux critères de Copenhague, la capacité de l’UE à intégrer de nouveaux membres étant prise en considération.
IV. BALKANS OCCIDENTAUX
15. L’Union européenne exprime son attachement total et sans équivoque à la perspective de l’adhésion des Balkans occidentaux à l’UE et appelle à accélérer le processus d’adhésion.
16. Le Conseil européen invite la Commission, le haut représentant et le Conseil à poursuivre, en s’appuyant sur la méthodologie révisée, l’intégration graduelle entre l’Union européenne et la région déjà au cours du processus d’élargissement même, de manière réversible et fondée sur les mérites.
17. Le Conseil européen rappelle l’importance des réformes, notamment dans le domaine de l’État de droit, et en particulier de celles liées à l’indépendance et au fonctionnement du système judiciaire et à la lutte contre la corruption. Il invite également les partenaires à garantir les droits et l’égalité de traitement des personnes appartenant à des minorités.
18. Le Conseil européen a été informé des évolutions récentes concernant les discussions entre la Bulgarie et la Macédoine du Nord. Il demande une résolution rapide des dernières questions en suspens afin que les négociations d’adhésion puissent être ouvertes sans tarder.
19. Le Conseil européen réaffirme qu’il est urgent de réaliser des progrès tangibles dans le règlement des différends bilatéraux et régionaux qui subsistent, en particulier dans le cadre du dialogue entre Belgrade et Pristina sur la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo*.
20. Le Conseil européen se félicite de l’accord politique conclu le 12 juin 2022 à Bruxelles par les dirigeants de Bosnie-Herzégovine, qui est nécessaire à la stabilité et au bon fonctionnement du pays et pour répondre aux aspirations de la population. Il invite tous les dirigeants politiques de Bosnie-Herzégovine à mettre rapidement en œuvre les engagements énoncés dans l’accord et à achever d’urgence la réforme constitutionnelle et électorale, ce qui permettra au pays de progresser résolument sur sa trajectoire européenne, conformément à l’avis de la Commission.
21. Le Conseil européen est prêt à accorder le statut de pays candidat à la Bosnie-Herzégovine et, à cette fin, il invite la Commission à rendre compte sans tarder au Conseil de la mise en œuvre des 14 priorités essentielles énoncées dans son avis, en accordant une attention particulière à celles qui constituent un ensemble important de réformes afin que le Conseil européen revienne sur la question.
V. QUESTIONS ÉCONOMIQUES
22. Le Conseil européen approuve dans l’ensemble les recommandations intégrées par pays
examinées par le Conseil, ce qui permet de clôturer le Semestre européen 2022.
23. Le Conseil européen se félicite du fait que la Croatie remplisse tous les critères de
convergence énoncés dans le traité. Il approuve la proposition de la Commission
relative à l’adoption par la Croatie de l’euro au 1er janvier 2023 et invite le Conseil à
adopter rapidement les propositions pertinentes de la Commission.
24. Rappelant la déclaration de Versailles ainsi que ses conclusions des 21 et
22 octobre 2021, des 24 et 25 mars 2022 et des 30 et 31 mai 2022, le Conseil européen
invite à nouveau la Commission à étudier avec nos partenaires internationaux les
moyens d’infléchir la hausse des prix de l’énergie, y compris la possibilité d’introduire
des plafonds temporaires pour les prix à l’importation, le cas échéant.
25. Étant donné que la Russie utilise le gaz comme une arme, le Conseil européen invite la
Commission à poursuivre d’urgence ses efforts en vue de sécuriser l’approvisionnement
énergétique à des prix abordables.
26. Le Conseil européen invite le Conseil, conjointement avec la Commission, à prendre
toute mesure appropriée pour assurer une coordination plus étroite en matière d’énergie
entre les États membres.
VI. CONFÉRENCE SUR L’AVENIR DE L’EUROPE
27. Le Conseil européen prend note des propositions figurant dans le rapport sur les résultats de la conférence soumis aux trois coprésidents. La conférence a été une occasion unique de dialoguer avec les citoyens européens.
28. Un suivi efficace de ce rapport doit être assuré par les institutions, chacune dans les limites de sa propre sphère de compétences et conformément aux traités. Le Conseil européen note que des travaux ont déjà été entrepris à cet égard.
29. Il rappelle qu’il importe de veiller à ce que les citoyens soient informés du suivi donné aux propositions formulées dans le rapport.
VII. RELATIONS EXTÉRIEURES
Méditerranée orientale
30. Le Conseil européen a fait part de sa vive préoccupation quant aux actions et déclarations répétées récentes de la Turquie. La Turquie doit respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les États membres de l’UE. Rappelant ses conclusions précédentes et la déclaration du 25 mars 2021, le Conseil européen attend de la Turquie qu’elle respecte pleinement le droit international, qu’elle apaise les tensions dans l’intérêt de la stabilité régionale en Méditerranée orientale et qu’elle favorise les relations de bon voisinage d’une manière durable.
Biélorussie
31. Le Conseil européen souligne le droit démocratique de la population biélorusse à de nouvelles élections, libres et régulières. Il invite les autorités biélorusses à assurer le respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit, à mettre un terme à la répression et à libérer les prisonniers politiques.
*Cette désignation est sans préjudice des positions sur le statut et est conforme à la résolution 1244/1999 du Conseil de sécurité des Nations unies ainsi qu’à l’avis de la CIJ sur la déclaration d’indépendance du Kosovo.